Comprendre le dialogue politique : Dr Félicité Akueson en parle

Le dialogue politique, on ne s’y jette pas. Il faut en mesurer tous les contours et prendre toutes les dispositions avent de s’y aventurer. La Secrétaire générale adjointe du parti Restaurer l’espoir (Re), docteure Félicité Akueson donne un éclaircissement.

Clément WINSAVI
Dr Félicité Akueson



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QU'EST-CE DIALOGUE POLITIQUE ?


Le dialogue est un arrachement. S’il est consenti, il est arrachement de toutes les parties qui y sont conviées. Le dialogue n’est pas un discours encore moins un monologue injoncif.
D’abord, le dialogue politique met en présence selon Francie LUND (spécialiste de politique sociale), des groupes d’intérêts différents qui éprouvent le besoin de se parler, de débattre franchement  d’une question dont les enjeux sont mutuels, même si ces enjeux ne sont pas nécessairement communs. Autrement dit, un dialogue politique permet aux participants de voir les problèmes qui se posent, en considérant les points de vue des uns et des autres. Ce qui requiert l’écoute mutuelle.
Ensuite, un dialogue politique doit être planifié, structuré, modélisé dans les moindres détails. Le programme d’un dialogue politique doit être clairement défini, les objectifs, les sujets de discussion convenus, les intervenants et le temps de parole, les sujets exclus du dialogue  politique, etc sont énoncés au préalable. L’ordre du jour doit être approuvé et communiqué à l’avance.
A considérer les critères d’un dialogue politique, on voit clairement que la démarche qu’adopte le Président Patrice TALON, loin d’être un dialogue politique, est un discours égocentrique en ceci qu’il se place au centre de tout et adopte une posture injonctive dans le dessein d’imposer ses propres pensées, ses seuls arguments et  d’exiger ses seuls actes. Ce schéma nous met en face de la pensée unique distinctive de démarches antidémocratiques à visée non consensuelle.
Je voudrais évoquer quelques modèles d’un dialogue politique. Je parlerai des conditions préalables dans le cas de la Conférence Nationale de février 1990 et des conditions qui ont rendu possible en juillet 2019, le dialogue politique au Burkina Faso en guise d’approches.
Loin de proposer une Conférence Nationale bis, je voudrais inviter les décideurs politiques à s’inspirer ne serait-ce que de la démarche ayant conduit à cette assise historique pour la paix qu’est l’historique Conférence Nationale de février 1990 au Bénin.
Je rappelle à cet effet qu’il est déjà arrivé dans notre pays que le Président de la République, le Général Mathieu KEREKOU, ait  pris des décisions pour rendre effective la réunion des fils et des filles du Bénin sous la médiation du Clergé Catholique conduite par Monseigneur Isidore de SOUZA pour débloquer une crise politique, sociale et économique. Il n’y avait eu aucune effusion de sang.
Pour le faire, il a pris des décrets pour :
* Amnistier tous les exilés politiques
* Libérer les détenus politiques
* Dissoudre l’Assemblée Nationale Révolutionnaire (ANR)
* Renoncer à la doctrine de l’Etat PRPB qu’était le socialisme scientifique fondé sur le marxisme - léninisme...
On parle dans ce cas de la nécessité de réunir les conditions préalables propices à l’amorce d’une démarche de décrispation. Mais il y a aussi un cas récent et très actuel à coté de nous au Burkina Faso.
Le dialogue politique au Burkina Faso a respecté l’essentiel des conditions requises: la pensée, la structuration, la fixation d’un objectif consensuel, le déroulé et le pilotage. Le dialogue politique au Burkina Faso « ... a pour vocation de contribuer au renforcement de la sécurité, de l’unité nationale, de la cohésion sociale et de favoriser la réconciliation  nationale ainsi que la tenue d’élections démocratiques et apaisées » (Cf. Rapport de synthèse du Dialogue Politique au Burkina Faso, Ouagadougou, du 15 au 22 juillet 2019).
Ce dialogue politique a prévu les participants à raison de 20 participants de la mouvance et 20 participants de l’opposition ; le genre y est respecté avec 25% de femmes dans chaque groupe et 05 membres du comité préparatoire.
Deux personnes ont été désignées en les personnes de Monsieur Simon COMPAORE, chef de la délégation de la mouvance présidentielle et de Monsieur Zéphirin DIABRE, chef de file de l’Opposition pour co-présider les débats.
Un dialogue politique requiert un cadre institutionnel. Le Dialogue politique au Burkina Faso a été institué par « Arrêté No 2019-002/PRES du 15 juillet 2019, portant création, organisation et fonctionnement du cadre de Dialogue politique au Burkina Faso suite aux différentes concertations avec la Majorité présidentielle et le Chef de file de l’Opposition »
Un Comité préparatoire a été mis en place par le Chef de l’Etat et composé comme suit :
- Président : le Ministre d’Etat, Ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Cohésion sociale ;
- Membres : deux représentants de l’Alliance des partis politiques de la Majorité présidentielle et deux représentants des partis politiques affiliés au Chef de File de l’Opposition politique ;
- Rapporteur : le Directeur Général des Libertés publiques et des Affaires politiques.
Tout ceci a été respecté par le Comité préparatoire inclusif qui s’est mis d’accord sur les points inscrits dans l’agenda du dialogue, le lieu, le calendrier et la durée.
Lorsque les conditions du Dialogue politique sont clairement définies et scrupuleusement respectées, il n’y a pas de raison que les protagonistes ne parviennent à un accord pour la paix et pour l’intérêt général.
En Démocratie, il n’appartient pas au Président de la République de dire qui va jouir des droits fondamentaux et qui ne doit pas en jouir. C’est la loi qui dispose de tels droits. Et la loi pour le faire doit être, non seulement l’expression des valeurs et des principes universels mais également, être en adéquation avec les critères normatifs et les exigences universelles techniques, morales, sociologiques, inhérentes au processus d’élaboration d’une loi.
Le Président de la République ne doit pas être l’interprète authentique de la loi. La loi doit pouvoir être compatible avec les exigences normatives et éthiques de l’Etat de droit et en adéquation avec les réalités sociologiques.
Enfin, je voudrais insister sur ce qui est actuellement la priorité pour le peuple tout entier:
- Réhabiliter la mémoire des victimes innocentes.
- Libérer le pouvoir législatif.
- Rétablir la Démocratie et l’Etat de droit.
- Réconcilier la Nation.

Dr. Félicité Adolé AKUESON
Maitre-Assistante en Philosophie Politique et Sociale;
Secrétaire Générale Adjointe , Chargée du Pôle Idées et du Programme du Parti "Restaurer l ' Espoir".

Commentaires

  1. C'est bien dit ma chère professeure. Vous voyez bien le sens de ce dialogue politique

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