Parlement béninois : les députés de l’opposition haussent le ton, dénoncent la cherté de la vie et le plan d’assassinat des opposants


Un grand événement a marqué la séance plénière de ce mardi 23 avril 2024 au parlement béninois. En effet, en marge de l’examen du rapport d’activités du président de l’Assemblée nationale, Louis Vlavonou, les députés de l’opposition ont donné de la voix. L’honorable Nourénou Atchadé et ses collègues du groupe parlementaire Les Démocrates ont fait une déclaration à la tribune. Par la voix de l’honorable Célestin Hounsou qui a présenté la déclaration, les parlementaires de la minorité parlementaire ont formulé plusieurs griefs à l’encontre de la gouvernance du pouvoir de la rupture. Les poulains du parti de la flamme de la démocratie ont d’abord fustigé la cherté de la vie au Bénin sous Patrice Talon. Pour eux, la suppression de l’Onasa qui régule les prix des denrées alimentaires reste une très mauvaise idée. Aussi, ils ont tenu la dent dure contre la brutalité avec laquelle la police république traite les citoyens béninois. Occasion pour les parlementaires opposants d’exprimer leur soutien au jeune Moïse Badjagou qui a filmé la bavure policière.

Les députés Démocrates ont fait de graves révélations lors de leur déclaration à la tribune. L’honorable Célestin Hounsou et les siens soupçonnent des plans d’enlèvement et d’assassinat. Ils tiennent ce soupçon, font-ils savoir, de sources sûres et dignes de foi et du fait de la mise en place d’un certain peloton dont la présence serait signalée à Kandi et Cotonou. Le groupe parlementaire Les Démocrates est revenu sur le code électoral adopté par le parlement le 5 mars 2024. Les parlementaires du parti du peuple insistent et signent. Pour eux, la loi électorale récemment promulguée porte les germes de crise et il est impératif de procéder à sa relecture.

LIRE L'INTEGRALITE DE LA DECLARATION

DECLARATION A LA TRIBUNE DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

 

Groupe Parlementaire « LES DEMOCRATES »

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Dès l’avènement du pouvoir du nouveau départ, le président Patrice TALON exhortait le peuple à serrer la ceinture en signe de sacrifice indispensable à l’amélioration durable des conditions de vie des populations. Seulement voici huit ans que le peuple souffre et meurt sous ce calvaire sans la moindre lueur d’espoir. Chaque jour, la conjoncture se fait plus rude et confine quasiment au désespoir. Pour la grande majorité aujourd’hui, les besoins existentiels basiques relèvent d’une véritable épreuve cornélienne. Le panier de la ménagère n’est pas que vide, il est troué, voire inexistant. Contrairement aux mirobolantes statistiques dont se gargarise avec arrogance le pouvoir, les Béninoises et les Béninois vivent un atroce chemin de croix et ne savent plus à quel saint se vouer. L’on se demande ce que nous avons fait pour mériter une telle calamité qui telle une tonne de chitine nous submerge et nous suffoque au-delà du supportable.

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

Dans notre pays aujourd'hui, malgré la création d'une agence prétendument pour le développement agricole, le maïs devenu la nivaquine d'alors est à 400 francs le kilogramme, faisant de notre premier aliment de base une denrée de luxe.

La faim et une misère endémique tenaillent nos concitoyens dans l'indifférence et l'arrogance totale d'un gouvernement incapable de prendre des mesures d’accompagnement pour soulager le peuple. Pendant que le clan au pouvoir, ses soutiens et ses obligés s'engraissent, le Bénin et une majorité silencieuse de Béninois croupissent dans la misère, dépérissent et meurent dans l’indifférence totale de nos gouvernants. Dans tous les pays au monde, la sécurité alimentaire est le premier programme de développement. Où est passé l'ONASA, cet ingénieux mécanisme de régulation des prix des denrées de première nécessité ?

Tout ça s'appelle réforme, n'est-ce pas ?

Une réforme qui affame et qui tue est un poison et un complot contre le peuple.

Depuis 2016, aucun secteur n’est à l’abri de la mal gouvernance et de la gabegie. Les producteurs de soja, de cajou et de karité vivent la destruction de l’économie rurale à travers des mesures de contrôle et de commercialisation des produits agricoles. Depuis environ trois ans, les producteurs sont tenaillés par des dettes liées au coût d’exploitation très élevés qui ne sont pas couverts par les ventes aux prix imposés par le gouvernement. En somme, le producteur agricole vend moins cher ses produits mais achète de plus en plus cher les intrants et quelques autres produits de première nécessité. Face à cette misère artificielle imposée aux producteurs par l’Exécutif, aucune réforme n’est envisagée par ce dernier, car le bonheur des producteurs agricoles n’est pas une priorité du pouvoir de la rupture.

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Malheureusement, au-delà des ténèbres de la tyrannie et de l'oppression du pouvoir de la rupture qui s’acharnent sur notre peuple, nous avons assisté stupéfaits ces derniers jours à un scénario cauchemardesque, plongeant notre Nation dans l’émoi et le désarroi.

Des tracasseries policières tous azimuts dans nos rues et axes routiers. Des agents de la police censés protéger et servir nos paisibles populations se sont transformés en bourreaux impitoyables. Une torride scène de violence policière dans la commune de Natitingou a récemment fait le tour des réseaux sociaux.

Le tableau est horrifiant et Ô combien révoltant. Un compatriote lâchement jeté à terre par une horde de policiers, molesté et sauvagement roué de coups de bottes, dans le cadre d’un contrôle ordinaire de port de casque. Sous d’autres cieux, l’auteur de la vidéo qui a révélé la bavure policière, serait porté en triomphe, comme ce fut le cas aux Etats-Unis dans l’affaire George Floyd. Mais chez nous, sur la base de la loi sur le numérique, loi drone qui viole la Charte Africaine des Droits de l’Homme et notre Constitution sur le droit à l’information, le compatriote Moïse BADJAGOU est traité comme un criminel. N’est-ce pas là une manière de décourager les dénonciations et de faire le lit à l’abus du pouvoir ? Nous invitons le juge en charge du dossier au bon sens, et témoignons tout notre soutien à Monsieur Moïse BADJAGOU pour son acte citoyen.

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

Dans le cadre de cette opération de répression policière actuellement en cours dans notre pays, le Directeur Général de la police républicaine Soumaïla Allabi YAYA a déclaré qu’il possède des fous de la police qui s’occuperont du cas des fous de la masse populaire qui refuseraient d’obtempérer. La gravité de ces propos suffirait à mettre hors d'état de nuire ce haut cadre en le libérant des charges qui sont les siennes pour le laisser jouir de sa retraite. Hélas ! Le tout puissant directeur général joue sur instruction et dans la cour de son maître qui lui dicte sa conscience ; sinon que la Police Républicaine n'est pas un asile psychiatrique pour être gorgé de psychopathes et autres éléments mentalement déréglés, qui se fourvoient éperdument, non seulement de l'éthique et de la déontologie d'une si noble profession, mais aussi et malheureusement de leur propre dignité humaine en s'attaquant à leurs semblables comme on s'attaquerait à des bêtes sauvages.

Du haut de cette tribune, nous saluons avec respect, le travail combien noble qu’abattent tous les jours que Dieu fait, les éléments de la police républicaine. L’action des brebis galeuses encouragées dans leur sale besogne par leur hiérarchie ne saurait déteindre sur la noblesse de la profession policière qui de nuit comme de jour, prennent des risques au péril de leur vie pour assurer la sécurité des populations.

 

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

Il nous est parvenu de sources concordantes et dignes de foi qu'il est désormais mis en place des pelotons d’exécution qui n’existent dans aucun texte de la République, pour traquer, étouffer et éliminer physiquement les opposants et les voix discordantes.

La présence de ces pelotons d’exécution est signalée entre autres à Kandi et à Cotonou pour des enlèvements et exécutions.

C’est donc à dessein que les exactions sont commises, et la réaction du DGPR en dit suffisamment long quand on le voit dans la défense de ses éléments.

C'est le reflet d'une tendance alarmante qui se propage comme une plaie béante sur toute l’étendue du territoire national. D'ailleurs, les témoignages affluent de toutes parts, révélant une série d'abus, d'atteintes aux droits de l'homme et de violence gratuite perpétrées par ceux qui sont censés incarner la loi et l'ordre républicain.

Monsieur le Président,

Chers Collègues,

Le dernier fait d’arme de la guérilla policière est l’enlèvement commando de l’activiste de la veille citoyenne Rémy GNAMBAKPO dont le péché aurait été d’avoir commenté une publication portée par un journal qui était à sa 418ème parution au nez et à la barbe de la haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (HACC). Nous adressons le soutien du Parti LES DEMOCRATES, de notre Groupe Parlementaire et de l'ensemble du peuple béninois épris de paix, à Rémy GNAMBAKPO tout en espérant que ce qui subsiste de la justice béninoise, saura rester assez fort et au-dessus de toute pression pour démêler l'écheveau et dire le droit. En tout état de cause, aucun état policier et aucune intimidation ne bâillonnera ce peuple désormais vaillamment debout pour défendre à cor et à cri sa souveraineté. Que les zélés du pouvoir de la rupture le retiennent pour de bon. Une dictature, disait quelqu'un, est comme un système de freinage. Quand il finit de bouffer les patins, il s'attaque au disque. Le retour de la manivelle est pour bientôt, et sera imparable. Car, nous le tenons de la mémoire du père fondateur de l’indépendance de notre pays, le Président feu Hubert Koutoukou MAGA, qu’aucune facture de la nature ne restera impayée.

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Vous le savez tous, puisque chacun le vit au plus profond de lui-même comme un drame lancinant, déchirant et menaçant.

Notre pays couve aujourd’hui une dangereuse bombe maladroitement goupillée dans ce même hémicycle, que nous devons ensemble désamorcer. Il s’agit du nouveau code électoral qui malgré ses nombreuses dispositions potentiellement crisogènes, est passé comme une lettre à la poste devant la cour constitutionnelle et promulguée par le président Patrice TALON. A l’examen, ce nouveau code électoral apparaît comme un instrument d’exclusion politique laissant planer des crises à l’horizon des élections générales de 2026.

L’adoption de cette nouvelle loi électorale introduit des dispositions qui font obstacle au pluralisme politique et dénature profondément les élections désormais soumises à la volonté de quelques privilégiés.

C’est ce qui justifie la farouche contestation de toutes les forces politiques de l’opposition, la plateforme des organisations de la société civile, la Conférence épiscopale et l’ensemble du cadre de concertation des confessions religieuses. Dans l’ordre des données de récrimination contre ce code, se trouve l’épineuse question du parrainage dont le taux est non seulement revu à la hausse (de 10 à 15%) mais fait désormais obligation aux élus de ne parrainer qu’un candidat membre ou désigné du parti les ayant présentés pour leur élection, instaurant de ce fait un mandat impératif en violation de la Constitution. Autrement dit, l’élu n’est plus qu’un porteur du parrainage, au lieu d’être le parrain. Contrairement aux dispositions de la loi fondamentale qui fixe un seuil d’éligibilité au plan national, le nouveau code électoral impose un filtre additionnel de 20% de suffrages par circonscription. Et pour se soustraire à cette double exigence objectivement intenable, il est aménagé une clause pour association de malfaiteurs malicieusement appelée accord de gouvernance et accord de coalition parlementaire. Selon ces dispositions, il peut arriver qu’un parti ait une majorité écrasante au plan national, et que pour défaut de 20% dans une seule circonscription électorale, se voit évincer pour que des listes laminées partout se soudent les coudes pour confisquer tous les sièges. Les nostalgiques de l’assemblée monocolore ne manquent pas d’imagination quand il s’agit de contourner la souveraineté des urnes pour détruire la démocratie béninoise chèrement acquise. Qu’ils se détrompent, ici c’est le Bénin et 2026 sera une autre histoire.

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Tout acteur politique béninois lucide, épris de paix, de justice et de liberté, devrait voir à travers les dispositions de ce nouveau code électoral des mesures d’exclusion graves susceptibles de parachever le démantèlement de notre édifice démocratique contrairement à la vue d’esprit de la cour des miracles du professeur Dorothée Cossi SOSSA. Cette cour qui s’est fait aliéner sa conscience, son magistère et toute son autorité en s’aplatissant devant le diktat du pouvoir d’un homme qui régente tout à sa seule volonté, a raté une occasion historique de redonner espoir au peuple béninois.

Seuls ceux qui profitent des crises politiques récurrentes, ceux qui voudront encore voir les populations civiles et militaires s'entretuer comme en 2019, 2020 et 2021 soutiendront ce nouveau code électoral.

Monsieur le Président,

Chers collègues,

Du haut de cette tribune et en interpelant la conscience patriotique de chacun de nous dans cet hémicycle et les exigences profondes de notre filiation à notre terre natale, nous prenons autorité de l'âme du Bénin et déclarons au nom de la paix que nous travaillerons ensemble à la relecture du code électoral en nous affranchissant courageusement de toutes tentatives d’intimidation, de distillation de la peur et de la terreur. Car, nous prévient le président Louis VLAVONOU que je cite :

« La plupart des guerres civiles sont les résultats de choix ou de décisions politiques », fin de citation.

 

Monsieur le Président,

Chers collègues,

L’heure est grave !

L’âme du Bénin, terre de Béhanzin, de Bio Guéra, de Kaba, de Toffa, de Monseigneur Isidore de SOUZA, de Mathieu KEREKOU, nous interpelle. Nous sommes chacun individuellement responsable de nos actes. Travaillons à rester du bon côté de l’histoire.

Je vous remercie.

 

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