Lettre ouverte aux institutions de la République : Un appel fort de Julien Kandé Kansou

 Au Bénin, tout entre dans l'incertitude surtout à l'approche des élections. Le jeune poète Julien Kandé Kansou s'en inquiète et appelle à une prise de conscience des présidents des institutions. Il leur a rappelé le rôle qu'ils avaient joué principalement lors des législatives 2019. Selon lui, un président d'institution de la République doit assurer sa fonction selon les aspirations de son peuple plutôt que selon la volonté d'une seule personne.




VOICI LA LETTRE INTÉGRALE



_*Lettre ouverte aux présidents des institutions : au cœur de la crise*_


 

La grandeur d'une institution, c'est sa capacité à concilier sa fonction et l'aspiration de son peuple. C'est sa possibilité à ne pas être soumise à la volonté d'un seul homme mais de son peuple. 


Je voudrais rappeler le rôle tragique et suicidaire que les institutions de notre pays ont joué dans l'organisation des élections exclusives, tachetées de sang, faisant basculer totalement le pays dans la tyrannie et la dictature. 


Quand la crise était à une étape où on ne pouvait que rebrousser chemin, le Président de la République a invité les présidents des institutions pour avoir leur accord pour sceller le sort de la démocratie.


Je ne voudrais pas rappeler les évènements, on a une assemblée monocolore, la révision de la constitution ayant pour conséquence la prolongation du mandat du Président de la République, la révision du code électoral ayant conduit à l'instauration du parrainage. On a eu une élection municipale la plus triste au monde avec le changement des lois au cours du jeu. Ce sont là les conséquences de votre accord. L'histoire retiendra que les âmes qui sont en souffrance, vous avez participé à leur deuil. Les prisonniers, les exilés, vous en êtes pour quelque chose.


Même si le parrainage n'est pas mal en lui-même, est-ce que ce sont les députés issues d'une élection exclusive qui vont empêcher les béninois d'être candidats ?


Je veux savoir, quand on parle de candidats fantaisistes, ce sont eux qui apportent leur dossier, utilisent leur moyen pour battre campagne. Ils font partie des généreux circonstanciels. D'ailleurs, le parrainage n'a pas son sens au moment où les lois en vigueur disent que si un candidat arrive à avoir un score donné, il reprend sa caution. Donc, le parrainage issue des députés nommés, n'est qu'un jeu pour créer l'instabilité dans le pays.


Je comprends que le chef de l'État travaille dans son pays tout comme s'il n'est pas un béninois. Dans ma langue maternelle, on dit: fi ô totché min wè gnià, nan hin fi ô gblé bà hi houé. En tradition littérale, on dit, ici, c'est chez moi ? Je vais détruire ce pays pour partir chez moi.


Si les partis politiques de la mouvance peuvent avoir leur récépissé d'existence sans aucune difficulté  mais les partis de l'opposition doivent souffrir et le Président donnera d'abord son ok dans *Jeune Afrique* avant toute délivrance du papier qui n'est même pas constitutionnel, j'ai l'impression qu'on a une volonté accrue de brûler le pays. 


J'ai envie de croire que notre pays est un pays éhonté après être traité de voyou par le chef de l'État. D'ailleurs, aujourd'hui, les décisions de justice n'engagent pas l'État, le cas Ajavon crève les yeux. Notre pays est devenu un État de mensonge et éhonté sinon comment des ministres viendront dire à la face du monde que les aspirants faisaient la vacation à 800 f par heure or c'était à 1500f même jusqu'à la rentrée passée ? Le contrat signé par les aspirants l'année dernière, c'est un contrat de 22 heures au plus par semaine, mais on parle de 24 heures. Tout ceci pour dire que le travail est désacralisé dans notre pays. La ruine du système démocratique entraînant les dettes, l'incapacité d'être constant et de diriger notre pays. Celui qui attaque l'éducation attaque la vie et la souveraineté du pays, mais sans état d'âme, le gouvernement veut tuer le système éducatif en appauvrissant les acteurs, détruire le niveau des apprenants avec un nombre élevé d'apprenants par classe. Si on ne peut par faire le job, il faut renoncer.


Sieurs les présidents des institutions, je vous montre de doigts ce qui se fait, mais la conséquence du passé dans l'avenir proche est que nous allons basculer dans les guerres, la méfiance, la traîtrise. Et cela personne ne sera épargnée. 


Je vous invite alors à s'engager pour le Bénin en rejetant toute forme de compromission pouvant conduire à briser la cohésion sociale. Hier, c'était, les exilés, la classe politique, les travailleurs,  les enseignants, les commerçants, les entrepreneurs, demain, c'est le tour de qui ? Je vous invite tous à démissionner s'il le faut de vos postes car, l'intérêt personnel ne peut pas primer sur l'intérêts général. 


Si vous le faites tôt pour conjurer le mauvais sort, vous auriez rendu service à notre État mais le contraire, beaucoup de personnes seront obligées d'aller en exil bien que personne ne les en veut. 


Je ne voudrais pas que ce qui se passe en CI, au Mali et un peu partout dans le monde se passe chez nous. Si cela n'arrivera pas, c'est à nous d'avoir les comportements qui réunissent. Le contraire sera le contraire. Je suis un écrivain engagé, je tiens à le rappeler. Je vous demande d'être tous engagés pour une seule cause : la paix. Et la paix n'est pas un vain mot, c'est le comportement, disait l'autre.


Julien Kandé Kansou, le 04 octobre 2020, 08h00

Commentaires

  1. Très belle analyse de la situation sociopolitique de notre pays. Je pense que toutes ces paroles ne sont pas tombées dans les oreilles du sourd.

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